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Dr Maudrux
Garo/phanie

Je m'excuse

Promis, à partir de l'an prochain je cesserai de vous importuner avec l'ASV, mais cette année, désolé, ce sera l'année de l'ASV. Tout, tout, tout, vous saurez tout sur l'ASV, le vrai, le faux, le beau, le moche...

Pour comprendre et mieux expliquer, je suis remonté jusqu'en 1946, origine des conventions. J'ai retrouvé les tarifs des 80 conventions départementales de 1959, année précédant la création de l'ASV. Les tarifs (peu respectés) variaient du simple au double d'un département à l'autre. On pourrait peut-être s'en inspirer quand on voit que les départements sous-peuplés aujourd'hui pratiquaient de meilleurs tarifs que ceux qui étaient surpeuplés. Le C variait de 350 à 600 AF, et le K existait déjà, à 350 AF ! Les tarifs d'autorité étaient respectivement de 280 et 200 AF.

 

1960 , début de l'ASV, facultatif , pour les médecins conventionnés, légalisé par un décret en 1962 . Début des distributions avec rachats (jusqu'en 1946) faciles : si vous aviez exercé 3 mois sous convention, vous validiez l'année, et pour une année validée, on vous en donnait 3 ! En 1968, trouvant les 5 points attribués chaque année insuffisants, on les porte à 9, avec effet rétroactif (+ 80 %, sans payer) , puis à 12 en 1972.

1968 , le décret est cassé par le Conseil d'Etat suite à un recours de la CSMF : un décret ne peut instituer un nouveau régime de retraite, il faut une loi. Discussions jusqu'en 1970 pour l'élaboration de la loi, demande de la CSMF et de la CARMF pour rendre l'ASV obligatoire, avec 3 raisons clairement décrites à l'époque :

- "Ne plus être obligés de cotiser pour constituer des réserves pour garantir l'avenir, grâce à la répartition". L'argent des caisses était à l'époque sagement mis en réserve pour le rendre au cotisant, principe de base de ces "honoraires différés", malheureusement abandonné.

- "Doubler la retraite et la mettre au niveau du régime complémentaire". Notons au passage qu'ils avaient triplé la valeur du point du régime complémentaire en 5 ans : + 15 à 43 % chaque année de 1965 à 1969, alors que dans le même temps la valeur du point ASV n'avait fait que suivre le coût de la vie, +17,5 %, d'où le décalage...

- Assurer l'avenir : les confrères ne croyaient pas à la pérennité d'un tel système, flairant un piège, seuls 46 % d'entre eux adhéraient à l'ASV, ce chiffre diminuant chaque année. La seule garantie d'avoir toujours des cotisants était l'obligation, et plus de cotisants permettait de financer les deux premiers désirs.

Vous pensiez que les caisses avaient imposé l'ASV pour que nous nous conventionnions ? FAUX. Elles étaient les seules à s'y opposer. Pas folles. Les médecins étaient déjà conventionnés , pourquoi payer pour cela ? Pourquoi étaient-ils conventionnés ? À cause du tarif d'autorité : les patients qui allaient voir un médecin non conventionné étaient mal remboursés. Cette mesure était suffisante pour qu'en 1972, 94 % des médecins soient conventionnés.

1972 , référendum : si l'ASV devient obligatoire, on peut doubler la retraite et baisser la cotisation de 40 % car vous serez plus nombreux à payer. Les confrères se seraient tous précipités et le référendum a été adopté par 83 % des confrères. FAUX.

En 1972 il y avait précisément 65 550 affiliés : 50 071 cotisants, 4 736 retraités, 6 065 conjoints survivants et 4 678 bénéficiaires du régime invalidité-décès. On n'a fait voter que les conventionnés en activité, et seuls 28 924 sur 46 742 ont voté. Il y a eu 23 989 OUI, 4 725 NON et 210 blancs. On n'a fait voter que ceux qui pouvaient dire OUI, excluant les non conventionnés et les retraités (60 % non adhérents). 83,5 % des suffrages exprimés pour l'ASV, mais seulement 47,9 % des actifs ou 36,6 % des affiliés.

À l'époque personne ne s'est inquiété de savoir si la loi fixant les règles du référendum et le résultat n'étaient pas en contradiction avec une loi qui veut que "pour instaurer un régime complémentaire de retraite, il faut l'accord de la majorité des assujettis au régime de base". Il manquait 6 447 voix pour respecter cette loi toujours en vigueur (Art L 644-1 du code de la SS).

On dirait que seuls ceux qui étaient concernés (46 % des actifs) ont obligé les autres à financer leurs "avantages", avec l'aide de quelques petits malins puisqu'à l'époque la CARMF a été submergée de demandes de rachats, certains flairant la bonne affaire : je mets 100 et j'encaisse autant chaque année, en toute légalité.

La moyenne individuelle des points déjà acquis est passée par conversion de 298 à 431 (+ 44,6 %), la valeur du point de 13,40 F au 30.6.72 à 20 F au 1.7.72, multipliant par 2,15 les retraites. Un administrateur des retraités se félicitait dans un courrier que "les "pionniers" du régime ont été les tout premiers gagnants de la mise en application du régime obligatoire et ceci grâce à la répartition alors que, facultatif, l'ASV fonctionnait sous l'empire de règles voisines de la capitalisation."

Vous connaissez la suite : distributions répétées de points à effet rétroactif (jusqu'à 37,52 par année pour 15 "achetés" et en réalité 10,5 payés) ; augmentations de la valeur du point supérieures à celles du C (de 1960 à 1998, la valeur du point est passée de 7,20 F à 106 F, multipliée par 15 alors que le coût de la vie était multiplié par 8) ; cotisations inférieures de 30 %, sans minoration des points pendant 20 ans ; épuisement des réserves de 22 ans à 0, etc.

Celui qui prenait sa retraite en 1980, rachetant 10 ans, récupérait en 1 an toutes ses cotisations, part caisse comprise ! Avec le même rendement, la cotisation moyenne aujourd'hui de 73 000 F donnerait une retraite annuelle de plus de 2 MF . Ramené à la seule cotisation ASV cela ferait 600 000 F par an . En prime en 1981 sa retraite augmentera de 20 % , de 10 % en 1982, ainsi de suite.

À cause de ces abus, l'ASV a disparu : 100 F cotisés aujourd'hui, devenus 300 F avec la part caisses, rapporteront moins que le régime complémentaire pourtant malmené. Où est l' "Avantage Social" ? En plus, non seulement il a fait perdre au médecin son rang social, passant de notable respecté (et aisé) à celui d'officier de santé corvéable à merci, au salaire de cadre, sans les 35 heures et les congés payés, mais il est devenu un moyen de chantage pour abaisser encore plus ce statut, sous peine de voir la cotisation tripler.

Pourquoi certains défendent-ils quelque chose qui n'existe plus ? Pourquoi pendant des années fallait-il ne rien dire, ne rien faire ? Pour que cela dure, avec le silence complice et bienveillant des syndicats "pilotant" le système. Leur incompétence, leur irresponsabilité va coûter des milliards aux cotisants, à côté desquels le prélèvement Juppé n'est qu'une peccadille : 86 milliards pour la fermeture, 240 milliards pour le maintien. Désolé, mais, quoi qu'ils en disent demain, je ne peux me taire.

La CARMF a aussi eu sa part de responsabilité, ses présidents et ses administrateurs poussant à cette gabegie jusque dans les années 85, se taisant jusqu'en 1995, se contentant de réclamer des augmentations pour maintenir 2 ans de réserves, ignorant le reste. J'assume cette responsabilité en tant que président actuel et vous présente les excuses de la CARMF qui fera son maximum pour réparer. Que chacun en fasse autant, une bonne confession vaut mieux qu'une mauvaise excuse et permettrait d'avancer.

Bonne année quand même, de la part de tout le Conseil d'Administration.

Le Président

Gérard MAUDRUX

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