Paris, janvier 2024
Quel lien peut exister entre ces trois mots ?
L’inflation a nécessité une augmentation significative des pensions pour la deuxième année consécutive (+4,7 % en 2023, +2,6 % en 2024). Or, pour revaloriser les pensions tout en assurant l’obligation légale d’équilibre technique du régime, nous devons augmenter les cotisations.
L’année passée, l’excellente gestion de nos réserves techniques avait permis d’absorber la hausse de la valeur du point. En 2024, le maintien à l’équilibre du régime complémentaire requiert une augmentation de 2 % des cotisations, faisant passer le taux de cotisation de 10 % à 10,2 %. Le régime complémentaire assure ainsi l’effort intergénérationnel, contrairement à l’ASV (appelé également PCV) dont la valeur du point n’a augmenté que de 2 % en 2023 (augmentation réalisée rétroactivement en décembre 2023) et dont aucune revalorisation n’est annoncée à ce jour pour 2024.
Pendant ce temps, la consultation médicale, elle, n’augmente que de 1,5 €, soit 6 %, après plus de 6 ans de blocage. Cette hausse représente moins de 1 % par an, moins que la seule inflation des années 2022-2023. Pas de doute, il s’agit d’un pansement sur une jambe de bois.
Pour nous faire culpabiliser de cette faible revalorisation, nos responsables nous accusent de dilapider « l’argent public », celui de la Sécurité sociale.
L’État aurait-il des leçons de gestion à donner ? Lui qui abuse de la fongibilité de l’argent des cotisations maladie pour financer autre chose que la Sécurité sociale.
Il semble ici nécessaire de revenir à la raison, à la réalité. La productivité du monde médical, c’est-à-dire d’après le dictionnaire, le rapport mesurable entre une quantité produite et les moyens mis en œuvre pour y parvenir, est propre à faire pâlir Elon Musk et Bill Gates réunis !
Aujourd’hui, les médecins soignent des maladies chroniques, autrefois graves et hautement invalidantes, comme le diabète, l’hypertension, les maladies coronariennes, etc. pour seulement cinq euros par mois, alors que trente ans auparavant, ces mêmes patients étaient facturés d’une consultation complète, beaucoup plus coûteuse, tous les mois, avec des résultats nettement moins pertinents.
La médecine ambulatoire a relégué aux oubliettes la majorité des hospitalisations en suite de soins, les progrès sont tels que le défi principal de la médecine d’aujourd’hui - empêcher nos grands vieillards de mourir - relève davantage de la philosophie que du soin. Je pourrais disserter des heures sur l’extraordinaire efficacité de notre métier et sur la rapidité de ses progrès, à un rythme auparavant inconnu de l’espèce humaine.
Je m’attendais, comme au moment du Covid, à ce qu’on continue de saluer le dévouement, la pertinence, l’efficacité et l’humanité de notre métier. Rien de tout cela. On nous parle de rémunération sur objectifs de santé publique, comprenez « sur critères financiers élaborés hors du métier de soignant », alors même que nos résultats sur les trente dernières années sont au-delà de ce que l’humanité pouvait espérer.
Au lieu de soigner grâce à la science et aux compétences intellectuelles de nos confrères, nous devrions le faire à l’appui de critères sans rapport avec la médecine ? En quoi, le logiciel que nous utilisons, l’alimentation du dossier médical, les demandes d’autorisation ubuesques pour prescrire tel ou tel traitement, la paperasserie et la bureaucratie nous permettent-ils de mieux soigner ?
Souhaite-t-on remplacer le soin au pied du malade par celui au pied de l’ordinateur, au prétexte qu’il serait prétendument plus économique et plus pertinent ? À terme, vise-t-on le remplacement de la médecine humaine par de l’intelligence artificielle ? Attention à ne pas placer trop d’espoir dans cette technologie, certes capable de répondre à des questions, mais certainement pas d’en poser.
C’est ainsi que nous allons tuer la médecine, les médecins et donc les malades. En 2020, l’espérance de vie française a reculé. Est-ce un artéfact ou une tendance ? L’avenir le dira.
Pour que les français aillent bien, il faut que les médecins aillent bien, pour que les médecins aillent bien, il faut les honorer à leur juste contribution à la Nation. J’ai foi en mes jeunes confrères. Ne les décourageons pas par de vaines mesures sans rapport avec la carrière qu’ils ont embrassée avec passion.
Je vous souhaite à tous une belle année 2024 pleine d’espoir d’un avenir différent, dans un monde qui bouge et où les médecins français fournissent un excellent service ; efficace, en silence pour le moment.
Si vous souhaitez maintenir l’efficacité et l’indépendance de la CARMF, je vous appelle à voter massivement aux élections de délégués en 2024 et à soutenir le travail du Conseil d’administration constitué de vos seuls représentants.
Avec mes confraternelles amitiés.
Docteur Thierry LARDENOIS
Année | Cotisation maximale | Évolution de la valeur du point pour une retraite liquidée à 65 ans |
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Régime de base |
Régime Complémentaire |
Régime ASV |
Régime de base |
Régime Complémentaire |
Régime ASV |
|
2014 | 6 138 € | 12 353 € | 7 316 € | 0,5620 € | 78,00 € | 13,01 € |
2015 | 6 688 € | 12 648 € | 8 644 € | 0,5622 € (1) | 78,40 € | 13,01 € |
2016 | 6 789 € | 12 975 € | 9 870 € | 0,5626 € | 78,55 € | 13,01 € |
2017 | 6 896 € | 13 318 € | 10 421 € | 0,5638 € (1) | 78,55 € | 13,01 € |
2018 | 6 985 € | 13 628 € | 11 334 € | 0,5672 € | 78,55 € | 13,01 € |
2019 | 7 124 € | 13 900 € | 12 367 € | 0,5690 € | 79,35 € | 13,01 € |
2020 | 7 231 € | 14 110 € | 13 069 € | 0,5708 € | 80,16 € | 13,01 € |
2021 | 7 231 € | 14 110 € | 13 141 € | 0,5731 € | 80,16 € | 13,06 € |
2022 | 7 231 € | 14 398 € | 12 952 € | 0,5911 € (1) | 80,56 € | 13,20 € |
2023 | 7 734 € | 15 397 € | 13 980 € | 0,6076 € | 84,35 € | 13,47 € |
2024 | 8 151 € | 16 553 € | 14 231 € | 0,6399 € | 86,54 € | 13,47 € |
Variation 2024/2014 | 32,80 % | 34,00 % | 94,52 % | + 13,86 % | + 10,95 % | + 3,54 % |
Variation 2024/2019 | 14,42 % | 19,09 % | 15,07 % | + 12,46 % | + 9,06 % | + 3,54 % |
(1)Valeur annuelle moyenne
Régimes | Montants 2024 (pour un revenu de 90 000 €) |
Taux 2024 | Taux 2023 | Évolution 2024/2023 |
Évolution 2024/2014 |
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Base
(1) Tranche 1 (< PASS(2)) Tranche 2 (< 5 PASS(2)) |
3 816 € 1 683 € |
5 499 € | 8,23 % 1,87 % |
8,23 % 1,87 % |
+ 3,68 % |
+ 27,59 % |
||
Complémentaire (< 3,5 PASS(2)) | 9 180 € | 10,20 % | 10,00 % | + 2,00 % | + 8,51 % | |||
ASV
Cotisation forfaitaire Cotisation proportionnelle Total |
Secteur 1 1 807 € 1 140 € 2 947 € |
Secteur 2 5 421 € 3 420 € 8 841 € |
- 3,80 % - |
- 3,80 % - |
Secteur 1 | Secteur 2 | Secteur 1 | Secteur 2 |
- 2,22 % | + 51,13 % | |||||||
Invalidité-décès | 712 € (classe B) | - | - | 0 % | - 1,11 % | |||
Total | 16 979 € | 24 232 € | + 1,85 % | + 0,72 % | + 9,97 % | + 25,29 % |
(1)Compte non tenu de la participation Assurance maladie pour les Secteur 1 (compensation CSG)
(2)PASS : Plafond annuel de Sécurité sociale, 46 368 € pour 2024.
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