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 La lettre du Président

Paris, mai 2024


Une injustice peut-elle être légale ?





Une future nouvelle assiette pour le calcul des cotisations ?


Nous travaillons depuis quelques mois sur le chantier de la transformation de l’assiette de calcul des cotisations sociales.


Aujourd’hui, vos cotisations retraite sont calculées sur les revenus nets d’activité indépendante. La CSG (Contribution sociale généralisée), quant à elle, est calculée sur la totalité des revenus professionnels, majorés des cotisations personnelles aux régimes obligatoires de Sécurité sociale des professions indépendantes (maladie, vieillesse, allocations familiales).


Vous payez donc de la CSG sur de l’argent que vous ne percevez pas.


C’est comme cela que les artisans commerçants et les professions libérales paient plus de CSG que les salariés depuis la création de cette cotisation sociale en 1990.


Surprenant au pays de « l’égalité et de la fraternité » mais c’est ainsi. C’est légal.


En 2018, à la faveur de l’augmentation de la CSG, nous assistons à une première tentative de réduire les différences de traitement avec la signature de l’avenant n°5 de la convention médicale introduisant une compensation de la hausse de taux pour les seuls médecins de secteur I via une participation de l’Assurance maladie.


Ce système étant toujours inégalitaire et face à l’insistance de syndicats catégoriels, l’État a enfin proposé de corriger cette injustice.


L’économie de CSG attendue, rien que pour la profession médicale est évaluée à 165 millions d’euros. Nous avions donc ouvert grande notre escarcelle. « Que nenni ! » nous dit la tutelle, « il n’est pas question que cet argent retourne dans vos poches, il doit servir à faire votre bonheur, même si c’est malgré vous ».


La solution la plus simple eût été de supprimer la surtaxe payée par tous ces professionnels libéraux. Au lieu de cela, nos technocrates se sont empressés de faire plus compliqué, couverts par de bonnes intentions.


Mais alors, comment faire ?


« C’est simple » répondit l’État, « nous allons transformer une cotisation sans droits » (CSG non déductible et non contributive) « en cotisation sociale retraite générant des droits supplémentaires et... un peu en cotisation maladie ».


L’idée nous interpelle et nous lançons nos limiers sur l’affaire, les calculatrices chauffent dans les caisses et au ministère.


Au ministère la messe est dite, 95 % de gagnants pour l’ensemble des professions libérales suite à la transformation d’une cotisation sans droits en une cotisation avec droits à pension, qui plus est déductible. L’idée est donc magnifique, la profession est priée d’exulter.


Du côté de la CARMF, nos calculs permettent de penser que l’affaire n’est pas si belle, car il y a un biais, pour les médecins. Nous prévoyons seulement 75 % de gagnants, mais nous pensons surtout qu’il y aura 25 % de perdants, en particulier la quasi-totalité des médecins en secteur II.


L’État, maintenant conscient du problème, nous demande quelle solution apporter. Il n’en propose pas pour autant : « le gouvernement fait la cuisine mais pas la vaisselle » ! Et c’est à ce stade de l’histoire que nous en sommes aujourd’hui.


Nous avons bien sûr proposé des pistes, à cette heure non retenues. Nous attendons celles de l’État, en ayant rappelé à nos interlocuteurs que la profession était une et indivisible, en dépit de nos différences, nous étions tous MÉDECINS.


La compensation nationale


N’oublions pas que ce n’est pas la seule injustice qui nous touche : nous payons, à revenu égal avec les salariés, quatre fois plus à la compensation nationale que ces derniers, et le Conseil constitutionnel a estimé qu’il n’y avait aucune rupture d’égalité. CQFD.


Le régime des indemnités journalières des libéraux


Poursuivons la liste des injustices avec le régime des indemnités journalières des libéraux couvrant les trois premiers mois d’arrêt de travail, celles qui sont prises en charge par les CPAM et non par la CARMF.


Depuis 2017, la CARMF réclamait la fin des trois mois de délai de carence. En 2021 ce fut chose faite, mais d’autres que nous en endossèrent la paternité. Peu me chaut, seul le résultat compte : les médecins libéraux peuvent être pris en charge sans attendre trois mois.


Malheureusement, le diable s’est caché dans les détails. Au lieu d’être confiée à la CARMF, la gestion de ce régime fut confiée à la CNAVPL, avec la curiosité d’être opéré par les CPAM.


Une usine à gaz de plus ! Là commencent les soucis. Si ce sont bien les CPAM qui versent les indemnités, l’État a exigé des professions libérales qu’elles assurent les paramètres de l’équilibre du régime, c’est le seul régime d’indemnités journalières français à y être contraint. Dans tous les autres régimes équivalents, le déficit est noyé dans les comptes de la Sécurité sociale. Injustice, vous avez dit injustice ? Mais au point où nous en sommes, allons plus loin.


Et cette injustice est multiple, car non seulement nous devons assurer l’équilibre financier du régime, mais nous devons le payer deux fois. En effet, rappelez-vous que nous payons 0,3 % de cotisation supplémentaire pour assurer ce régime, le tout en payant l’URSSAF afin d’assurer l’équilibre des autres régimes, mais pas le nôtre.


Des injustices pas sans conséquence ?


À l’heure où des confrères ultramarins se déconventionnent, ne faudrait-il pas que les autorités cessent ce que l’on peut considérer comme une discrimination socio-économique : « vous payez plus parce que vous gagnez correctement votre vie ».


Nous ne sommes pas les seuls dans ce cas, nous sommes bac + 10, et nous sommes socialement indispensables.


Comment ne pas s’interroger sur la « santé du monde de la santé » ?


Nous vivons tous des bouleversements inédits, alors que notre profession n’a jamais failli. Nous avons fait des progrès fulgurants en termes de diagnostic et de traitement, et notre investissement tant personnel que professionnel est sans comparaison dans le monde du travail : investissement Covid, prolongation de carrière en cumul pour ne pas abandonner nos patients, horaires à rallonge, honoraires bloqués...


En dépit de tout cela, nous sommes attaqués de toutes parts : augmentation d’honoraires ridicules, blocage de la négociation conventionnelle, transferts de tâches irréfléchis et professionnellement déraisonnables, fermetures de services hospitaliers publics comme privés, pénuries de matériel, de personnel, de médicaments, contraintes administratives insensées, financiarisation à marche forcée de pans entiers de nos métiers, convention médicale ubuesque.


Veut-on tuer une profession qui est aux portes de la réanimation et qui se bat tous les jours pour ne pas y entrer, et entraîner les Français avec elle ?


Si je dénonce ici des dysfonctionnements, je n’en suis pas moins optimiste. La jeune génération est pleine d’énergie, d’idées, elle est porteuse d’espoir. Il faut seulement que les Pouvoirs publics comprennent que la médecine s’écrit par des médecins, pour des médecins dans l’intérêt des français et que notre profession ne les a jamais trahis.


Avec mes confraternelles amitiés.


Docteur Thierry LARDENOIS


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